Et partir

Quand la maison s'enlise dans la tourbière des souvenirs

Lourde de tant de petites boîtes élégiaques apostrophant le soir

De tiroirs débordant de lettres minutieuses

D'ardeurs affectueuses et d'objets épuisés

Que j'aurais dû jeter

Quand de cave en grenier je ne vois plus l'étoile

Il est temps de partir.

Trier choisir jeter faire de mes étagères

De vastes horizons presque nus

où se découpent un arbre une éolienne.

De ma bibliothèque désherber la mémoire

Retracer les allées lessiver les grands marbres

Et déchiffrer dans un murmure

Les exvotos accrochés aux monuments familiers.

Dans l'ombre des armoires abattre et élaguer

Donner de la lumière aux sujets remarquables

Le manteau messager des hivers vagabonds

La robe noire des dîners de l'espoir

Le jupon coquelicot des danses de l'été.

Trier choisir jeter

De tout le superflu faire un autodafé

Etre prête à partir quand surgit le désir.