Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

LES DEUX OEUVRES QUE J'AI LUES

Je l'ai découvert il y  a plusieurs années avec "Le temps où nous chantions", histoire d'une famille de musiciens plutôt doués,  une famille où se côtoient négritude et judaïsme, à l'époque des grandes manifestations, du "Black is Beautifull" et des Black  Panthers. Une famille dont les membres se battent pour conquérir la place qu'ils méritent,  une course d'obstacles, un chemin jalonné de tribulations. Je le redécouvre aujourd'hui à la loterie des échanges de livres entre amis, avec "L'ARBRE MONDE", un beau livre dont les héros sont les arbres, les forêts, et les hommes et femmes qui ont compris l' importance pour l'humanité de leur puissance symbolique.

"Douglas Pavlicek se réveille au moment où Mimi s'emplit les poumons une dernière fois (elle vient de vérifier la composition du parfum diffusé par l'écorce d'un Douglas) avant de retourner à l'air conditionné. Il lui faut encore une brève éternité pour comprendre qu'il est dans sa chambre de motel, celle qu'il a louée après avoir claqué deux cents dollars en bières, et en avoir perdu cent autres au billard. Pas de quoi lui arracher la moindre grimace. Cet après-midi la panique du réveil est plus concrète. Toute son angoisse se concentre sur la quantité d'abattage autorisée; il se demande si, ces quatre dernières années, il ne s'est pas fait pigeonné, s'il n'a pas gâché sa vie ou pire encore.

Il a manqué de quatre heures le petit déjeuner continental offert par la maison. Mais le réceptionniste lui vend une orange, une barre chocolatée et un café, trois trésors inestimables issus des arbres qui lui permettent de se traîner jusqu'à la bibliothèque municipale. Là il trouve un bibliothécaire disposé à l'aider dans sa recherche. L'homme extrait des rayonnages plusieurs volumes de codes et de législation, qu'ils explorent ensemble. La réponse n'est pas rassurante. Machin Deux, ce connard fort en gueule, avait raison. Planter des arbustes n'a rien accompli, sinon donner le feu vert pour de gigantesques coupes claires. Quand douglas admet cette réalité indubitable, c'est l'heure du dîner. Il n'a rien mangé de la journée depuis les trois cadeaux des arbres. Mais l'idée de manger, de remanger un jour, lui donne la nausée.

Il a besoin de marcher. Marcher: la seule chose sensée qui lui reste. Ce qu'il désire vraiment, c'est se précipiter vers une colline scalpée et y réimplanter l'avenir, c'est ce que savent faire ses muscles, surtout le plus gros de son arsenal: son âme. Une pelle et un sac plein de jeunes recrues vertes. Ce que , jusqu'à ce jour, il voyait comme un espoir.

.........Mais il ne peut faire taire les questions: Qu'est-ce que je vais faire maintenant, pour les quarante ans qui viennent? Y a-t-il un travail que l'efficacité de l'humanité unie ne puisse réduire à du simple engrais? Il marche des heures et des kilomètres, contourne le centre-ville de Portland pour pénétrer dans un quartier paisible, à la fois résidentiel et quartier d'affaires, attiré par un parfum qu'il ne peut nommer. Il s'arrête à une épicerie pour acheter une bouteille de jus verdâtre, qu'il boit en lisant les annonces punaisées sur un panneau à l'entrée. Chat perdu hyper-intelligent.Rééquilibrez votre chi. Appelez à l'étranger pour moins cher. Et puis:

Tous à la mairie! Le 23 mai!

Richard Powers, romancier américain

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :