QUELS MOTS POUR CETTE SURPRISE?
Qui aurait cru qu’un jour, dans Paris, dans sa banlieue, nous réentendrions voler les mouches et roucouler les tourterelles ? Mais aussi que nous parlerions à nos voisins et applaudirions à tout casser chaque soir à vingt heures. C’est pourtant ce que nous avons vécus, métamorphosés en Robinsons et Robinsonnes Crusoés, chacun sur nos îlots respectifs, certains avec un Vendredi pendant que d’autres découvraient ou redécouvraient la solitude et ses visages, les chants d’oiseaux, les petites orgues bourdonnantes des insectes, le frelon, la guêpe, l’abeille, la mouche, sans oublier la libellule. Et les flûtes traversières des merles, les jacasseries métalliques des pies, avec leurs airs de gouvernantes d’autrefois dans leur uniforme noir et blanc, et le roucoulement de la tourterelle, celle qui a élu domicile dans l’allée qui mène à mon jardin. Il faisait si beau que j’ouvrais les fenêtres, la rumeur des voitures s’était tue, la tourterelle et ses roucoulements me tenaient compagnie. Je m’essayais même à les accompagner.
ROYAL COVID
Née de quelle culminante folie
Forgée par quels douteux sorciers
Cette royale couronne aigrie
De fulminantes canines armée.
Apprentis-sorciers
Fruits d’arrière-boutiques
De régimes populaires qui en vitrine
Affichent en gros : « République Démocratique »
Oubliant de caser le N de négation
Entre le O de surprise et le C de conviction
(Démoncratique serait plus adapté)
Tout en pratiquant le féodalisme
En multipliant les privilèges
De castes dirigeantes sans couronnes.
Folle folie des grandeurs
Fantasme d’une toute puissance conquise sans bataille
Couvé dans l’ombre d’une muraille
Aux fondations scellées dans la peur
La pire des peurs, la peur de découvrir
Que cette peur lui sert de raison d’être
De justification à tous ses excès.
QU'EST-CE LA VIE?
Qu’est-ce la vie
Cette vie que tu encaisses
La vie si vive
Qui te presse
Entre ses rives
Parfois fleuries
Parfois transies ?
Sources de vie
Flots secrets vagues craintives
Tapies furtives
Quand il surgit
Un ennemi.
Cet ennemi
Repeint de douceur
Tout près du cœur
Se tapit
Comme chat
Cherchant la chaleur
L’accueil d’un bras.
Des fenêtres
Modestes sensibles
Dans un imperceptible
Soupir
Bâillent s’étirent
Et des regards
S’éveillent.
Des lèvres
Esquissent un sourire
Une langue s’impose
Au silence géant
Réduit à néant
Par l’héroïque désir
De dire.
De dire
La vie qui va, coule,
De dire les obstacles
De chercher les mots
Qui osent sauter
Pour franchir les barrières
Et le soir
Chantent dans des milliers de rues
Portés par des voix vibrant de fraternité
De reconnaissance, d’humanité
Car elle est toujours là
A résisté aux assauts
Des tout-puissants de l’argent
Des fantasmiques du pouvoir sans limites.
LE VELOUR NOIR DU SILENCE
Ecoutez bien, la musique est dans le silence.... et le silence dans la musique
Sur le velours noir du silence
Sur la basse continue des bourdons
Et des abeilles cherchant leur pitance
Etincelle le chant du pinson.
Sur les longs rubans noirs du macadam
Les archets des autos se sont tus
Cédant l’avant-scène au mélodrame
Des vieilles pies en froufrous de tutus
Pour leur part les jeunes pies s’interpellent
A corps, à cris, aigus et stridents
Qui rayent le dais bleu du ciel
Mieux qu’une pointe de diamant.
Le rouge-gorge est bien plus discret
A qui s’adressent ses pépiements ?
Toujours à l’orée du bosquet
Où bien caché son nid l’attend ?
Sa dame brune tout le jour y couve
De ses ailes et de son chaud giron
Ses chers œufs, plus pugnace qu’une louve
Plus tendre que mère donnant biberon.
Plus grand demain sera le danger
Quand tous les œufs grand-éclos seront
Qu’avant de chanter puis s’envoler
Les petits de joie pépieront
Le roucoulement des tourterelles
Roule d’un bord à l’autre de l’allée
Les divas s’égaient dans un froissement d’ailes
Aussitôt que l’on vient à passer.
C’est le printemps de tous les repos
Le virus couronné a tranché
C’est la fête au pays des oiseaux
Dans mon jardin tout là-haut.
Goguette sur l'air de "C'était au temps où Bruxelles chantait"
Grand merci à Jacques Brel
C'ETAIT AU TEMPS
C’était au temps où Paris se taisait
C’était au temps du virus couronné
C’était au temps des trottoirs désertés
C’était au temps où certains s’enfuyaient
Et l’air impérial
L’édile national
Prenait la parole
Que personn’ ne s’affole
Les yeux dans les étoiles
D’une Europe en cavale
Situation presque normale
Vu l’diagramme international.
PARLE
Scandé style manif
"Vérité, simplicité, fraternité !
Ah ça ira, ça ira, ça ira !
On veut respirer du bon air
Ah ça ira, ça ira, ça ira !
On va respirer l’ère Corona !"
Ok ça marche ça roule, super
Ma vie glisse comme sur un coussin d’air
En kimono prise de judo,
Ipon
Sur un tatami au Japon.
En bronzage et bikini
Je guette ma proie
Je fais mon choix
Sur un’ chais’ longue à Capri !
CONFINEMENT EN GOGUETTE sur l’air de « J’attends Madeleine » J.BREL
Moi j’attends le déconfinement
On nous l’promet pour mi-mai
J’ai acheté du crémant, du bourbon et du p’tit lait
J’vous dis pas l’cocktail dément
On caus’ra en javanais
On rira nerveusement
Bien content d’être sur pied
Tout en pleurant au-dedans
Pour tous ceux qui on succombé
Sur les tombes pas de lilas blancs
Car il est déjà fané.
LA QUEUE DES CONFINES
Ils tentent, ça joue la resquillette
C’est la vieille peur de la disette
Qui hante les ventres et les têtes.
Les rouleaux de papier-toilette
Obsèdent la clientèle inquiète.
Devant la palette
Loin d’être complète
On grogne, on fait le coup de poing,
On voudrait, on aimerait du moins.
La peur de manquer
Un peu avant Pâques
Gloria ! Est ressuscitée.
La longue queue parfois ondule
Comme la mer sous la férule
D’un vent de folle envie,
De « moi d’abord » et à tout prix.
Imperturbable le vigile,
Saint-Pierre aux portes du Paradis
Compte les heureux élus,
Trop heureux de quitter la file
Pour se faufiler entre les gondoles
Les mâchoires serrées,
Pas un qui rigole.
Les queues aux caisses sentent la détresse
En se croisant forment des tresses.
Et pourtant rien ne presse, ni demain
Ni aujourd’hui, pour les confinés.
Confinés seront jusques aux confins de la Saint-Glinglin !
Le confinement finalement est un moment plein d'enseignement, les sens sont en alerte maximale, car c'est le seul lien avec l'environnement, la vie qui va, le monde qui bouge. J'ai eu la chance d'avoir en face de chez moi un chantier de toiture d'ardoise.
EN REGARDANT LES TOITS
Les toits d’ardoise aiment la pluie
Qui les transforme en miroirs
Les revêt du reflet des nuages gris
Des cheminées maquillées de noir
Le noir de la fumée, de la suie,
De la sueur des soutiers, des mineurs,
Des dockers, des livreurs.
∞
Loin des clichés inodores
Des visages sans saveur
Des regards paisibles des corps sans sueur
Les toits d’ardoise qui se font rhabiller de neuf
Deviennent pays de fatigue et de rire
De dos brisés de soupirs
De bras douloureux
Brandissant les lourdes pierres presque bleues
Vers le voisin agenouillé
Une boîte de pointes à sa portée
Le marteau prêt à frapper.
∞
Son téléphone collé à l’oreille
Le contremaître sur le faîtage va et vient
Semble plus à l’aise qu’un lézard sous une treille
Mais la distance gomme l’expression des regards.
Au-dessus des têtes
Casques et casquettes
Pas de petites bulles proclamant :
« J’en ai marre ! »
Les toits d’ardoise aiment la pluie qui les asperge
Les éponges du vent qui effacent essuient
Les transforment en tableaux vierges
Vierges et noirs
Où la lumière écrit une nouvelle histoire.
∞
Loin des clichés inodores
Des visages sans saveur
Des regards paisibles des corps sans sueur
Les toits d’ardoise qui se font rhabiller de neuf
Deviennent pays de fatigue et de rire
De dos brisés de soupirs
De bras douloureux
Brandissant les lourdes pierres presque bleues
Vers le voisin agenouillé
Une boîte de pointes à sa portée
Le marteau prêt à frapper.
∞
Son téléphone collé à l’oreille
Le contremaître sur le faîtage va et vient
Semble plus à l’aise qu’un lézard sous une treille
Mais la distance gomme l’expression des regards.
Au-dessus des têtes
Casques et casquettes
Pas de petites bulles proclamant :
« J’en ai marre ! »
IMPACT ? MOT IMPACTANT
Nous sommes tous empaquetés
Dans l’impact douillet de la pandémie
Le Covid a impacté les dépenses de santé
L’économie mondiale est empaquetée
Presque paralysée
Les convois sur les voies de garage sont sans voix
Pas un grincement pas un coup de sifflet
La World Economy
Est impactée aussi.
Empaquetés parce qu’impactés
Ou impactés parce qu’empaquetés
Nous sommes tous mal barrés
Sous l’impact de la pandémie.
Une pluie d’impacts
Ne vous laisse pas intact :
Vous vous retrouvez recensés
Personne à risque porteur sain
Citoyen pestiféré
Dans un cluster cloîtré.
Alors vous êtes en droit de penser
Que votre heure a sonné
Au lieu de décompter les points d’impact.
Dans cette tragédie sans entracte
Impact est un mot épatant.